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Le développement de l'âme

Alfred Percy Sinnett
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CHAPITRE XI :
LES FRÈRES AÎNÉS DE l'HUMANITÉ (2/3)

La civilisation de l'Atlantide, tout avancée qu'elle fût sous bien des rapports, présente dans le milieu de son histoire une période marquée de décadence et d'avilissement. Pourtant, au sein même de ces troubles, quelques individus formant l'élite de la race Atlante profitèrent de l'enseignement d'instructeurs plus avancés encore, et commencèrent à donner à leur race des Adeptes de son « propre sang ». Quelque peu de science occulte suffirait cependant à nous faire sentir l'étrangeté de ce terme ; car l'organisme physique , qui d'après notre langage semblerait constituer à lui seul la race, n'a en réalité qu'une part bien restreinte dans l'évolution humaine. Aussi, dès la période moyenne de la race Atlante, les Adeptes n'ont jamais manqué à l'humanité ; il faut se souvenir que la mort n'a aucune action sur leurs conditions d'existence. Ils peuvent transférer leur activité sur les plans supérieurs de la Nature ; mais ceux-ci ne font-ils pas partie intégrante de notre monde au même titre que la manifestation physique. D'autre part, la réincarnation, lorsqu'elle est volontairement consentie par l'Adepte, bien qu'elle ne lui soit plus nécessaire, ne modifie en rien sa condition d'Adepte, et quant aux frères aînés qui, les premiers, s'élevèrent à cette condition, soit qu'ils aient accompli leur mission dans leur corps ou hors de leur corps, avec ou sans cet accessoire, ils n'entreprirent assurément aucune fonction nouvelle avant d'avoir été suppléés par d'autres Adeptes, sortis des rangs de l'humanité et prêts à présider à leur tour aux destinées des humains. Ce furent eux, ou leurs successeurs qui dirigèrent les grandes « Loges » occultes d'Initiation, à une époque bien antérieure aux plus anciens documents de l'histoire. L'existence de ces Loges, et les moyens d'en obtenir l'accès (pour les hommes résolus à subir l'entraînement nécessaire et animés des dispositions convenables), étaient mieux connus dans les temps anciens que dans ces derniers siècles.

      Les frères aînés ne pouvaient compter sur de nombreux renforts pendant la prédominance de la race Atlante. Cette race était d'abord foncièrement égoïste ; on pourrait même alléguer que cet égoïsme était nécessité par ses fonctions dans l'évolution, et que ces Atlantes ne furent pas plus coupables que ne l'eût été une troupe d'animaux placés dans les mêmes circonstances.

      Parfaitement individualisés, mais c'était tout, ils eurent pour mission de conduire la multitude des humains jusqu'à la cinquième race, en développant suffisamment leur intelligence pour les mettre à même de comprendre la première leçon de l'arc ascendant du grand cycle, celle de l'union fraternelle. Les Atlantes étaient supérieurement organisés sous le rapport intellectuel, mais dépourvus de tout ce qui ressortait de l'intuition spirituelle. Les connaissances très étendues qu'ils possédaient ont été perdues par les jeunes générations de la cinquième race, par nous-mêmes et nos ascendants immédiats.

      Dépassant les limitations de nos sens physiques, ils avaient pénétré bien des mystères du plan Astral et obtenu des résultats encore insoupçonnés par la science actuelle. N'oublions pas que ces renseignements, puisés aux sources de la science occulte, concernent la race atlante à son apogée.

      L'humanité est. entrée dans son cinquième cycle douée de toutes les capacités intellectuelles nécessaires pour retrouver la science oubliée des Atlantes, et elle y parviendra certainement avec le temps. La réincarnation d'une race se comprend, par analogie, comme la réincarnation individuelle. La nouvelle personnalité arrivée à l'âge adulte entre en possession de toutes les potentialités engendrées par son Ego permanent durant la vie précédente ; et la race nouvelle hérite également, dans la même proportion, des facultés de celle qui la précéda. Les Atlantes furent des sommités intellectuelles ; nous ne leur sommes certainement pas très inférieurs, et la possibilité de les égaler nous sera donnée en temps voulu.

      Quelque chose de plus encore nous sera accordé, si nous en avons le désir : l'éveil des facultés nécessaires pour comprendre les potentialités spirituelles de notre nature intime. La courbe descendante du grand cycle doit être envisagée comme une courbe d'élaboration ; la courbe ascendante, au contraire, favorise l'épanouissement, dans la ronde actuelle ; elle commence au point nadir de la quatrième race.

      Selon la conception ésotérique, tout cycle évolutif implique en quelque sorte un retour vers la condition primitive qui lui donna naissance. Il ne s'agit pas ici d'un simple retour vers le statu quo ante, sans l'acquisition d'aucun résultat.

      Ce retour doit toujours produire un résultat, et ce résultat consiste ici dans l'individualisation de la conscience alliée à la spiritualité ; c'est la seule distinction qui différencie l'existence spirituelle d'où la race humaine émergea à l'origine, de l'existence spirituelle vers laquelle elle retournera finalement.

      Tout écrivain qui s'occupe de ces mystères transcendants doit vivement sentir son impuissance à les concevoir et à les décrire dans un langage courant. Aussi renoncerait-on volontiers à cette prétention ; mais pour comprendre l'évolution spirituelle entreprise actuellement par l'humanité, il est indispensable d'enseigner ces conceptions finales, bien que notre esprit n'en puisse obtenir qu'une idée vague et inexacte. Il paraît certain qu'en pénétrant et dépassant même les profondeurs infinies de ces états spirituels, triomphe final de l'humanité perfectionnée, l'homme ne perdra jamais la conscience individuelle, ce trésor inestimable que la Nature mit tant de soins à élaborer.

      On accuse souvent à tort la doctrine ésotérique orientale de concevoir la félicité suprême comme une annihilation extatique d'un genre spécial, constituant l'unique récompense des luttes et des souffrances endurées, ici-bas, pendant d'innombrables incarnations. Cette croyance décourageante repose en grande partie sur des analogies erronées, dont la plus gracieuse – celle de la goutte d'eau se noyant dans l'immensité des mers – est cependant fausse sous bien des rapports.

      Aucune figure de rhétorique ne peut certainement rendre les subtilités profondes de la pensée qui cherche à comprendre l'incompréhensible et à dépeindre des états de conscience incompatibles avec les limitations du cerveau humain ; mais la comparaison serait peut-être plus juste si l'on disait que la goutte d'eau, en atteignant l'état nirvanique, reçoit en son sein l'immensité de la mer ; cette analogie peut n'être pas très claire, mais elle ne contient aucune idée fausse.

      Je renonce à la tâche ardue de définir cet état spirituel que la philosophie orientale nomme Nirvana ; je me bornerai à en présenter une conception moins imparfaite et moins bizarre que celle qui est généralement adoptée. Comme je l'ai fait pour la goutte d'eau, je comparerai cet état plutôt à l'absorption de la conscience universelle par l'individualité, qu'à l'absorption de l'individualité par la conscience universelle.

      Quoi qu'il en soit, nous pouvons en conclure que le but de la Nature, en développant l'humanité, fut de créer des centres individualisés sur les plans spirituels qui, à l'origine du monde, projetèrent l'impulsion créatrice.

      Est-il permis d'employer ce terme « origine » en parlant d'une Nature qui n'a ni commencement ni fin ?

      Il est impossible, en effet, d'assigner un commencement ou de prédire une fin à l'ensemble de la création, et l'une des plus graves erreurs, engendrées par les vues étroites da la théorie exotérique, est d'identifier, un peu trop légèrement, la famille humaine aux grandes éternités de l'espace et du temps. La science ésotérique, qui raisonne logiquement, considère l'humanité, son origine et ses destinées (quelle qu'en soit la durée) comme un épisode transitoire dans ces éternités.

      Cet épisode doit prendre fin lorsque le pouvoir créateur, dont la mystérieuse activité développe le système planétaire, revient sur lui même, transformé en centres individualisés. Quelle est la nature de ces individualités ? Selon notre hypothèse, elles participent de la nature humaine, puisqu'elles sont individualisées, et de la nature divine, puisqu'elles sont, une fois de plus, identifiées au pouvoir créateur de l'Esprit. Ce ne sont plus des hommes, mais des dieux. On ne peut dire qu'ils sont Dieu, ce mot ne pouvant désigner que l'Esprit Omnipotent Universel (autant que notre langage en peut exprimer l'idée) ; mais ils sont les agents de la divinité dispensant ses pouvoirs et exécutant ses décrets. La donnée ésotérique considère ces êtres perfectionnés, à la fois comme le résultat final du progrès humain et comme le pouvoir dirigeant d'une évolution future qui, dans l'ordre naturel, suivra celle où ils prirent eux-mêmes naissance.

      « La légion des Dhyan-Choans », tel est le titre donné par la philosophie orientale à ce magnifique épanouissement de la race humaine.

      Au stade actuel de l'évolution, il nous est possible à tous, hommes et femmes, de développer suffisamment notre individualité naissante pour atteindre à cette condition. Mais la hiérarchie spirituelle qui s'élève à cet état divin comprend bien des degrés intermédiaires ; et longtemps avant d'atteindre ces hauteurs, l'Ego qui évolue et cherche à se détacher des jouissances matérielles commencera à exercer dans la Nature certains pouvoirs, à y assumer certaines responsabilités qui l'associeront en quelque façon à l'idée divine.

      Rappelons-nous aussi que, dans leur intelligence physique, la plupart des hommes ne sont conscients que du plan matériel où ils se manifestent. La conscience spirituelle qui les dirige s'exprime sans cesse dans le « Soi Supérieur ; » mais l'attraction pour ce qui est matière, pour la vie matérielle, pour ses affections et ses jouissances s'oppose à ces aspirations latentes. Tant que dominera l'attraction matérielle, l'Ego, après la période dévakhanique qui suit la mort, sera encore entraîné vers la manifestation matérielle (34) par le karma de sa vie passée. Si, au contraire, la spiritualité s'affirme pendant la vie, de meilleures opportunités de développement s'offriront à la conscience spirituelle dans l'incarnation suivante ; et si elle sait en profiter, une sorte de contact s'établira rapidement avec les réalités sublimes des plans supérieurs. L'homme incarné sentira alors s'éveiller en lui de nouveaux sens, de nouveaux pouvoirs de perception, et ces facultés psychiques, dont la lumière indécise égare ceux qui les ont mal acquises, deviennent, lorsqu'elles sont bien dirigées, les voies de la véritable connaissance. Pour le vrai néophyte, ce sont les premiers liens d'union consciente avec le monde des Adeptes, avec ces frères aînés qui ont actuellement dépassé de beaucoup les conditions normales que la Nature assigne à l'humanité.

      Guidé par leur lumière, le néophyte peut s'avancer sur le sentier qui conduit aux états d'existence supérieurs. Son initiation a commencé ; l'ardent désir du progrès spirituel grandit en lui et domine la force des désirs grossiers qui l'enchaînaient à la vie matérielle ; les attractions qui le poussaient à une incarnation normale ont cessé de l'asservir. Peut-être se feront-elles sentir pendant quelques existences encore, après qu'il aura entrepris l'œuvre de son développement, peut-être aussi sera-t-il retardé par un obstacle imprévu. Mais s'il se montre résolu et persévérant, ses tendances spirituelles triompheront enfin. Il ne s'incarnera plus que volontairement, et pour mieux accomplir encore l'œuvre à laquelle il s'est voué, c'est-à-dire le développement spirituel de toute la race humaine. Lorsqu'il a atteint ce niveau, le néophyte coopère o déjà à l'œuvre de la Providence, il est devenu l'instrument conscient de la volonté divine.

      Je m'en tiens à cet exposé superficiel, me réservant de décrire plus tard les différents stades de l'initiation. J'ajouterai seulement une remarque. Celui qui pressent, même vaguement, les conditions d'existence de l'homme tout à fait spiritualisé, ne cherchera pas ailleurs le mobile de ses efforts à entrer dans la bonne voie. Considérons d'abord les motifs les plus nobles dont l'homme puisse s'inspirer ; nous examinerons ensuite ceux qui, tout élevés qu'ils soient, se rattachent à l'intérêt personnel.

      Il n'est pas douteux qu'un homme, dont la conscience spirituelle est bien développée, devienne, avec le temps, un collaborateur de la divine Nature, en tant que son désir d'acquérir des pouvoirs soit entièrement subordonné au soulagement de ses semblables et que ce sentiment altruiste soit positivement le seul mobile de ses efforts. Il se peut aussi que bien des personnes pressentant déjà, plus ou moins parfaitement, cette grande vérité, affirment que leur propre activité n'a pas d'autres motifs. Sans incriminer la confiance prématurée que leur inspire cette pureté d'intention, nous observerons que les hommes, appartenant encore au plan de l'incarnation, ne peuvent tous invoquer d'aussi nobles sentiments ; ils peuvent donc avouer sans crainte que l'abnégation, le courage physique indispensables au développement de la nature spirituelle, proviennent chez eux d'un vif désir d'entrer en relation plus intime avec les êtres glorieux qui, ayant brisé les liens de la chair, se sont élevés jusqu'aux régions supérieures. Ce n'est pas un sentiment de bas égoïsme qui leur fait considérer l'exaltation spirituelle comme digne, en soi, des plus nobles aspirations – surtout lorsqu'on lui compare l'existence matérielle.

      L'homme pourra d'ailleurs, au cours de son pèlerinage, s'inspirer tour à tour de ces différents motifs ; mais ce serait une erreur d'augmenter inutilement les difficultés inhérentes aux premiers stades du développement occulte, et ceux qui veulent y entrer rendront courage à la pensée que, dès les premiers pas, ils trouveront dans cette voie une récompense digne de leurs efforts.

      Ces considérations nous démontrent que la voie de l'initiation ou du développement occulte est une entreprise digne de tenter les plus nobles représentants de l'humanité ; aucune œuvre philanthropique ne saurait lui être comparée. On conçoit, en effet, que plus l'association de ceux qui atteignent l'adeptat grandit en nombre ou en puissance, plus s'accentue l'influence qu'ils exercent sur l'humanité entière ; ils activent son évolution spirituelle et l'affranchissent ainsi des terribles rétributions karmiques, causes de ses misères et de ses souffrances physiques, tandis que la simple philanthropie, impuissante à s'élever au delà du plan terrestre, est limitée dans le choix du sa sphère d'activité. Afin d'éviter ici tout malentendu, laissez-moi vous dire que la voie du développement occulte n'est pas une carrière qui puisse être choisie de préférence ou en remplacement d'autres œuvres de bienfaisance.

      Lorsque des hommes de bien, mus par un noble sentiment de fraternité, entreprennent une œuvre quelconque de philanthropie, cette œuvre ne peut nuire en aucune façon à leur développement intérieur ; elle peut, au contraire, le servir si ces hommes joignent à leurs sentiments altruistes le désir de la connaissance spirituelle et s'ils font pour l'acquérir les efforts compatibles avec les devoirs et les responsabilités de leur vie. Ceux qui n'ont glané que quelques idées imparfaites dans la littérature orientale et dans les contes de la Yoga, commettent facilement l'erreur de s'imaginer que l'accès du sentier de l'Initiation conduit l'occultiste à se priver de tout commerce avec ses semblables, à s'absorber dans un égoïsme spirituel et à rechercher la béatitude spirituelle par la méditation solitaire et d'austères pratiques.

      L'entraînement occulte exige indubitablement l'abnégation, c'est-à-dire l'absence de toute indulgence envers soi-même. ; il faut aussi consacrer un certain temps, sans nuire pour cela aux devoirs altruistes, au développement intérieur de la conscience spirituelle ; il est d'ailleurs peu de carrières d'activité philanthropique où l'on ne puisse en trouver le loisir. Je dirai plus : le philanthrope actif se trouve, par cela même, dans des conditions d'avancement spirituel plus favorables que l'homme uniquement préoccupé de son développement personnel, bien que l'inactivité relative de ce dernier ne soit nullement blâmable.


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(34)  C'est-à-dire dans une nouvelle incarnation physique. N. D. T.




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